jeudi 30 août 2012

William Cliff



qui sommes-nous ? notre nom point ne trace
de grand sillage dans l’ordre où s’amasse
le tapage que vous faites ici –
et nous rêvons – et l’attente nous glace
devant la mer où nous sommes assis
.

et vous passants qui regardez
ces gens gisant à terre
et qui passez sans demander
ce qu’il faudrait leur faire
peut-être fuyez-vous parce
que vous voyez en eux le se-
cret motel qui vous désespère
.

pourquoi faut-il que je me fane
comme fleur sur le ciment
alors que je me sens dans l’âme
de quoi t’aimer entièrement ?
.

laissez-moi librement
avancer sur la route
sans qu’un homme ne m’en
détourne et m’en dégoûte
.

le rêve humain embrasse le monde qui ne rêve pas
mais la somme des rêves rêvés depuis que l’on rêve
n’aura pas de tout l’univers changé un iota
.

dans le désert des grandes villes
où le vent court incessamment
on voit parfois dans l’ombre un fil
descendre sur nous lentement

*
Bibliographie

- L’Etat belge, éditions La table ronde, 2000

mercredi 29 août 2012

Sylvie Durbec



La nuit est un pays qui palpite comme un cœur.
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L’oiseau ne connaît aucune réponse,
il possède seulement son chant.

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Bibliographie

- Chaussures vides, Scarpe vuote, éditions Les carnets du Dessert de Lune, 2010

mardi 28 août 2012

Carlos Fuentes



La musique est l’image du monde sans corps.
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La musique me procure tout le temps dont j’ai besoin. Je n’ai que faire des calendriers.
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La jalousie est généreuse, on voudrait que l’autre vous appartienne.
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On pense mieux dans l’obscurité.
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Le problème de l’artiste, c’est qu’il ne sait pas très bien distinguer entre ce qui est considéré comme la normalité quotidienne et la créativité qui, pour lui, est également quotidienne, et non exceptionnelle. On sait que l’artiste qui attend l’arrivée de l’ « inspiration » peut attendre jusqu’à la fin de ses jours en regardant passer les coqs de bruyère en face d’un œuf au plat et d’un morceau de chorizo.
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Nous n’apprenons rien. Le sexe nous enseigne tout, pourtant. C’est de notre faute si nous ne tirons jamais aucune leçon et retombons, encore et encore, dans le même piège délicieux…
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Les passions qui restent enfermées à l’intérieur de soi peuvent nous tuer par implosion. Le chant les libère en trouvant la voix qui les exprime.
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Les accents mélodiques de la voix, le mouvement du corps dans la danse, nous libèrent. Le plaisir et le désir se confondent. La nature dicte les accents et les cris : ce sont là les mots les plus anciens, c’est pourquoi le premier langage est un chant passionné.

*

Fuis, va-t’en, il est encore temps ; tu n’as pas compris ; je t’ai offert une année entière toi et moi ensemble, une année de ta vie d’homme, qui n’est pas égale à mes années de femme, mais tu l’as refusée ; tu serais mort après une année pendant laquelle tu m’aurais aimée chaque nuit ; désormais il va falloir attendre, si longtemps, si longtemps ; garde la carte, reviens, cherche-moi, dans cent ans, deux cents ans, mille ans, le temps qu’il faudra pour que nous soyons de nouveau, en même temps, jeunes toi et moi, les deux ensemble dans le même temps, au même instant.

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Tu ouvres les yeux. Tu regardes le monde réel autour de toi et tu sais que tu es ce monde et que c’est pour lui que tu te bats. Ce n’est pas la première fois que nous nous battons. Tu cesses de sourire. C’est peut-être la dernière.

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Bibliographie

- L’instinct d’Inez, éditions Gallimard Folio, 2003
-  Terra Nostra I & II, éditions Folio, 1989